[Logement Social] NON il n’y a pas de mots interdits !

Par Christophe CHAMPOUSSIN • Gérant ANAXIA CONSEIL • 23 mars 2020 • LinkedIn

On entend souvent dire (de manière générale mais particulièrement dans le secteur du logement social) qu’il y a des mots « interdits ».

Je m’oppose formellement à cette vision des choses.

Cette « croyance » a selon moi plusieurs sources :

  • Les différents mises en demeure de la CNIL sur la base de commentaires inappropriés

  • Les différents guides ou livres blancs qui laissent à penser cela et propagent cette idée

  • Les éditeurs eux-mêmes qui, parfois mal conseillés, ont créé des outils pour bloquer certains mots (venant d’une bibliothèque heureusement modifiable), voire, pire, les remplacer automatiquement par d’autres.

En fait rien n’est DE FAIT ou DANS L ‘ABSOLU interdit et tout est affaire de CONTEXTE.

Prenons deux exemples :

  • Un locataire appelle son bailleur social et la discussion est un peu tendue. Suite à cela, le/la chargé(e) de clientèle note un compte rendu de l’entretien où se glissent les mots (à l’attention de ses collègues) « Attention gros con ! » (pardon mais j’illustre). Bien sûr qu’il NE FAUT PAS NOTER cela !

  • Ce même locataire rappelle et insulte le/la chargé(e) de clientèle (« gro(se) con(ne) ! ». Et là bien sûr qu’il faut le noter « la/le locataire a dit « …. »). Aucune raison de ne pas tracer cela.

Il y a donc des mots « à surveiller » (qualifions les de sensibles) mais pas de mots interdits.

Conseils à utiliser lors de la saisie (ou de l’écriture, car tout cela vaut aussi pour les formulaires papier) des commentaires :

  1. Rester toujours objectif, rien de subjectif

  2. Ne noter QUE des éléments factuels, rien qui ne puisse apparaître comme un jugement, une évaluation, un avis (« le client a cassé la vitre » est un fait, « c’est un imbécile » est un avis, par définition subjectif non ?

  3. S’imaginer que la personne lit ce que l’on note sur elle par-dessus notre épaule ; si on est gêné(e) alors mieux vaut probablement ne pas écrire cela, à tout le moins pas de cette manière !

Il faut aussi prévoir des contrôles et des sensibilisations en prenant des cas extraits du logiciel métier / CRM (sans dire qui a écrit ni qui cela concernait, peu importe) et en indiquant ce que l’on aurait pu mettre ou encore que dans tel ou tel cas ça ne se justifiait pas, même sur le fond

Vous avez des dizaines de milliers de commentaire et souhaiteriez faire un audit ? Un conseil : demandez à votre informatique d’extraire ceux qui se terminent par 3 points ou un point d’exclamation !

Sur quoi repose tout cela (ainsi que les mises en demeure de la CNIL) ?

  • Sur le 5.1.c du RGPD : « [Les données doivent être] adéquates, pertinentes et limitées à ce qui est nécessaire au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées ».

  • Ou son équivalent le 6.3° de la Loi I&L d’avant le RGPD pour les mises en demeure de cette époque : « Elles [les données] sont adéquates, pertinentes et non excessives au regard des finalités pour lesquelles elles sont collectées et de leurs traitements ultérieurs ».

Dire qu’un client est "con" est-il adéquat et pertinent ? Certains répondraient oui s’il étaient confrontés au problème. Mais n’est-ce pas subjectif ?

Je pourrais ajouter le 5.1.d « [Les données doivent être] exactes ». Là encore tel ou tel terme ne seraient pas jugés exact (ou inexacts) de la même manière par tous !

Terminons avec une note sur les données de santé dans le secteur du logement social. Si feu les 3 délibérations du pack de conformité logement social de 2014 autorisent (mais encadrent) les données de santé, ce n’est pas la porte ouverte à tout.

Le 5.1.c ci-dessus reste applicable (avec de plus ici l’interdiction (9.1) et les exceptions(9.2) mais c’est une autre problématique à traiter).

Donc lors du traitement d’une demande (ou d’une mutation), savoir qu’une personne est en fauteuil roulant est clairement une donnée utile, justifiable, acceptable … mais savoir pourquoi (la pathologie) NON. Ce à quoi certains répondront « oui mais si on sait que c’est un sclérose en plaques alors on sait que c’est évolutif et on anticipe ! ».

Certes mais 1) conseiller clientèle et médecin ce n’est pas la même profession et 2) se limiter à « maladie évolutive » peut suffire non ? Avec un certificat médical qui dirait que à telle échéance il faudra probablement prévoir ceci ou cela et donc anticiper.

En espérant avoir contribué à éclaircir cette problématique (complexe) des mots sensibles.

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